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(...)
Eh ! Messieurs, pardon et "l'exemple
Salutaire", qu'en faites-vous ?
La Justice est laide, en son temple,
Coupant les têtes à genoux.
Gais tueurs aux âmes sensibles,
Le dilème est clair et parfait :
Faites des échaffauds terribles,
Ou supprimez-les tout à fait.

(Les Deux échafauds, 1878)

Croyants étrangler les pensées,
Les bourgeois pendent les penseurs.
Malgré les potences dressées,
Les pendus ont des successeurs.
Vous pouvez viser les idées
Et les abattre, dans vos tirs :
Elles gandissent, fécondées
Par le sang des martyrs.

Exploiteurs des deux hémisphères,
Russes, Français, Américains,
Négriers, tripoteurs d'affaires,
Monarchistes, républicains,
D'un bout à l'autre des deux pôles,
Contentez vos secrets désirs :
Plongez-vous, jusqu'au deux épaules,
Dans le sang des martyrs.
(...)

(Le Sang des martyrs, 1887)


  La Veuve, auprès d'une prison,
Dans hangar sombre, demeure.
Elle ne sort de sa maison
Que lorsqu'il faut qu'un bandit meure.
Dans sa voiture de gala
Qu'accompagne la populace,
Elle se rend, non loin de là,
Et, triste, descend sur la place.

Avec des airs d'enterrement,
Qu'il gèle, qu'il vente, ou qu'il pleuve,
Elle s'habille lentement,
La Veuve.

Les témoins, le prêtre et la loi,
Voyez, tout est prêt pour la noce.
Chaque objet trouve son emploi :
Ce fourgon noir, c'est le carrosse.
Tous les accessoires y sont :
Et les deux paniers pleins de son :
La corbeille de mariage.

Alors, tendant ses longs bras roux,
Bichopnnée, ayant fait peau neuve,
Elle attend son nouvel époux
La Veuve.

Voici venir son prétendu,
Sous le porche de la Roquette.
Appelant le mâle attendu,
La Veuve, à lui, s'offre, coquette.
Pendant que la foule, autour d'eux,
Regarde, frissonnante et pâle,
Dans un accouplement hideux,
L'homme crache son dernier râle.

Car ses amants, claquant du bec,
Tués dès la première épreuve,
Ne couchent qu'une fois avec
La Veuve

Cynique, sous l'œil du badaud,
Comme, en son boudoir, une fille,
La Veuve se lave à grande eau,
Se dévêt et se démaquille.
Elle retourne dans son bouge.
De ses innombrables maris
Elle porte le deuil en rouge.

Dans sa voiture se hissant,
Gouge horrible, que l'homme abreuve,
Elle rentre cuver son sang,
La Veuve.
(La Veuve, 1887)
 

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